Jolanta Jastrzêbska

 

 

 

 

 

 

 

 

En quoi consiste le caractère spécifique des écrivains féminins polonais P/C 1 :

 

Dans cette étude j'ai présenté l'analyse de trois romans: Dieu, le temps, les hommes et les anges  (trad. F. 1998) d'Olga Tokarczuk, Cette année à Zawrocie de Hanna Kowalewska et Cabaret métaphysique (Kabaret Metafizyczny; trad. F 2003) de Manuela Gretkowska. Mon interprétation reposait sur les points de vue de la critique littéraire féministe, en particulier les écrits de Hélène Cixous et Luce Irigaray, qui, depuis des années, essayent de préciser le phénomène dit «écriture féminine». Selon elles, il existe un rapport entre les œuvres conçues par les femmes et leur corps et, par conséquent, la structure et le langage des écrits féminins sont différents de la perspective phallocratique qui caractérise les œuvres masculines. En même temps, une partie de la critique littéraire féministe rejette ce point de vue strictement biologique et propose d'envisager des attitudes féminines et masculines en tant que résultat des conditions culturelles et sociales d'un moment donné. De plus, les deux discours, féminin et masculin, semblent en train de s'influencer, et à cause de ce mouvement il est presque impossible de les différencier. La littérature hongroise, depuis ses débuts, offre plusieurs exemples de la perspective féminine adoptée par des auteurs masculins, qui montrent une préférence singulière: celle de créer un narrateur féminin à la première personne. Un tel procédé est presque inconnu dans la littérature polonaise, le roman de Tomek Tryzna Mademoiselle Personne [Panna Nikt. 'B&C' Piotr Bagiñski, Warszawa, 1995] est le seul exemple que je puisse donner. La question qui se pose est de savoir si les écrivains masculins peuvent créer un discours féminin vraisemblable. Les problèmes soulevés par les approches féministes d'un côté et les différences entre la littérature polonaise et hongroise de l'autre côté m'avaient conduite à examiner les romans mentionnés plus haut en tant qu'exemples de l'écriture féminine.

 

Suivant l'opinion selon laquelle le corps détermine la perception de la réalité et en se référant à la critique féministe de la conception freudienne du phallus, on peut considerer le sexe féminin comme un espace ambigu : plein de vie, mais caché, invisible et par conséquent mystérieux, fermé, donc difficile à approfondir, en même temps prêt à s'ouvrir, à recevoir et à assurer le gîte à une nouvelle vie. Ces traits caractéristiques, appliqués aux textes féminins, laissent supposer que le discours féminin préférera le silence, la réticence, la distance envers les affaires du monde, l'hésitation et la recherche de soi-même. L'intimité et la vie privée semblent dominer dans les textes écrits par les femmes, ce qui explique la préférence de description des espaces fermés.

 

Les romans que j'ai analysés confirment les hypothèses énumérées ci-dessus, les textes sont écrits selon le postulat de Luce Irigaray «parler femme». Dans le roman de Tokarczuk l'action se déroule dans l'espace fermé d'un petit village et le destin féminin, la vie intime et quotidienne sont plus importantes que les guerres pour lesquelles les hommes quittent la maison. L'univers mythique incorporé dans ce roman est aussi peuplé de personnages féminins. Le texte se sert d'images empruntées à l'hagiographie liée à la Sainte Vierge (et non à Jésus): la jeune femme K³oska se promène au village avec les serpents autour de son corps, faisant ainsi allusion à la Vierge qui a vaincu le mal.

 

L'univers du roman de Kowalewska est plus contemporain, mais aussi fermé. Près d'un village, dans une villa entourée d'un jardin presque paradisiaque, la jeune femme, Matylda, passe des semaines de solitude, malgré les reproches de son amant et le danger de perdre son travail. Elle essaie de comprendre et de reconstruire la vie de sa grand-mère, une personne autoritaire et ambitieuse qui probablement juste avant sa mort a décidé de changer son comportement dirigé auparavant par les valeurs si importantes dans le monde masculin : la carrière, la position sociale et la richesse. Matylda prend le temps de définir ses propres buts dans la vie.

 

Le texte de Gretkowska est avant tout une parodie de plusieurs genres et styles littéraires: un conte philosophique, un roman familial, une histoire d'amour et de la pornographie. Un récit maigre sur l'amour entre un étudiant germanisant et poète raté, Wolfgang, et Beppa Mazeppo est un prétexte pour aborder les questions actuelles de notre culture. Beppa donne des spectacles pornographiques dans le Cabaret Métaphysique où quelques personnages masculins discutent les problèmes philosophiques (entre autre Freud) et des questions tout à fait banales. Après tout, Beppa se décide à épouser Wolfgang et, par conséquent, à renoncer à sa carrière (problématique du point de vue féministe !). L'ironie de Gretkowska est évidente : le choix entre la carrière et le foyer peut être plus complexe que les féministes le prétendent. Gretkowska tourne tout en dérision, y comprise l'écriture féminine.

 

Quelques remarques comparatives sur la littérature hongroise et polonaise P/C 3:

 

Les essais de Lajos Pálfalvi (PÁLFALVI P/C 1, 2), parus dans les volumes précédents de ½A perifériáról a centrum½, m'ont conduite à élargir l´aperçu qu´il a donné de la littérature polonaise contemporaine. Deux notions qu´il a mentionnées, le messianisme polonais et le grotesque, m´ont servi de prétexte pour envisager l´influence que le romantisme a exercé sur la mentalité polonaise durant plusieurs décennies et pour souligner le rôle du grotesque en tant que tendance opposée. Cette perspective m´a offert la possibilité d'indiquer certaines différences entre la culture polonaise et hongroise.

 

La notion de messianisme polonais, lancée par Adam Mickiewicz sous l'influence du cercle de Towiañski en France dans les années quarante du 19ème siècle a été dès le commencement très problématique. Pourtant le mythe héroïque selon lequel la nation polonaise s'est formée pendant la Deuxième Guerre mondiale et le martyrologe de Solidarité montrent des traits communs avec cette notion de jadis. En même temps, le romantisme polonais pèse lourdement sur la conscience nationale; il y a eu plusieurs tentatives pour s'en débarrasser, comme le prouve l'œuvre de Stanis³aw Ignacy Witkiewicz, Witold Gombrowicz (surtout dans son Journal) et Stanis³aw Dygat. Le trait caractéristique de leurs œuvres est une vision dérisoire et grotesque de la réalité et, par conséquent, extrêmement critique envers les mythes glorifiant la nation et son passé. Cette tendance est continuée avec vivacité par les écrivains contemporains, tels que S³awomir Mro¿ek, Tadeusz Konwicki, Manuela Gretkowska, Antoni Libera, Jerzy ¯urek. Par contre, les tendances grotesques dans la littérature hongroise sont presque négligeables.

 

Malgré des conditions historiques comparables: deux nations qui ont souffert pendant des siècles de l'oppression de l'Autriche et de la Russie, leur vision de la culture diffère sur plusieurs points. Les deux nations ont une très riche littérature crée par les écrivains émigrés, difficilement accessible dans la période communiste (1945�). Tandis que les Polonais s'en occupaient toujours et l'ont incorporée dans l'ensemble de ce qu'on appelle ½la littérature polonaise½, les Hongrois y sont restés indifférents et la situation n'a pas changé après 1989. Ce comportement s'explique par une expérience historique différente: la grande littérature romantique polonaise – les oeuvres d'Adam Mickiewicz, de Juliusz S³owacki et de Cyprian Norwid – a été crée par les émigrés en France, et de ce fait les Polonais se sont accoutumés à l'idée que la culture polonaise n'est pas nécessairement liée au territoire du pays, mais à la langue. Par contre, malgré les répressions qui ont suivi l'Insurrection de 1848�, la plupart des Hongrois sont restés en Hongrie. La première grande émigration hongroise n'a eu lieu qu'après la Révolution de 1956; elle était donc une ½nouveauté½. Le manque d'intérêt pour les oeuvres littéraires crées par ceux qui ont quitté le pays en 1956 et qui pour la plupart sont devenus écrivains à l'étranger, est stupéfiant, d'autant plus que cette littérature (en particulier la poésie) contient tous les traits caractéristiques que la critique littéraire hongroise considère comme essentiels pour la littérature contemporaine ; malheureusement on se penche seulement sur les œuvres conçues sur le territoire hongrois. Il me semble qu'un pays qui reproche à l'Europe occidentale son manque d'intérêt, ferait mieux de réévaluer son héritage en prenant en considération les valeurs offertes par les auteurs émigrés, reconnues comme telles par l'Occident. Le succès de Sándor Márai à l'étranger peut servir d'exemple.

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